Bonjour Olivia,
La question est complexe car, si les craquelures prématurées sont quasiment toujours la conséquence d'une technique fautive, elles peuvent avoir de multiples causes. Et, en l'absence de l'œuvre, il est toujours difficile de porter un diagnostic clair.
j'ai suivi avec Jean Pierre Poidevin un cours de peinture à l'huile.
J'ai cru comprendre, d'après les explications de votre amie, que Jean-Pierre Poidevin enseignait, durant ce cours, la technique mixte, donc la manière de travailler "maigre sur gras".
J ai peint deux peintures à l huile sur bois (contreplaqué) que j'ai préparé avec des couches de blanc d espagne melangee a la colle de peau de lapin.
Le contreplaqué est un excellent support. Concernant l'enduit, le dosage colle/charge pigmentaire est essentiel. Souvent, celui donné dans les ouvrages techniques est trop riche en colle. C'est le cas, entre autres, dans le livre bien connu de Xavier de Langlais. Le surdosage en colle est une première source possible de craquelures.
Ensuite, je pense avoir bien applique gras sur maigre et je n ai pas utilise de siccatif.
La question à se poser est : Avez-vous travaillé "gras sur maigre" ou "maigre sur gras" ? Si vous avez travaillé à la manière de Poidevin, on peut penser à une technique "maigre sur gras". Dans ce cas, êtes-vous sûre de bien avoir superposé "maigre sur gras", donc "émulsion sur médium", mais dans le frais ? Travailler ainsi est à la base de cette technique, le principe "sine qua non". Sinon, superposer une couche maigre à l'émulsion sur une couche grasse au médium déjà sèche est la garantie de voir se produire des craquelures, et parfois très rapidement ! La couche maigre ne peut s'enraciner sur la couche grasse sèche. Elle glisse sur elle. Il se produit ce qu'on appelle des craquelures de retrait.
Apres deux ans, elles presentent des craquelures ( genre en peau de crapaud).
Tout à fait ce que je viens de décrire.
La technique mixte paraît bien compliquée aux yeux des peintres qui ne la connaissent pas, car elle demande l'utilisation de deux produits, non pas un seul : un médium et une émulsion. Dans les faits, elle est remarquablement simple. Elle permet, entre autres et justement, d'échapper à la tyrannique règle du "gras sur maigre". Par contre, elle demande, et de manière absolue, de travailler "maigre sur gras" dans le frais.
Maintenant, si vous avez travaillé, à l'inverse et en bonne conscience, "gras sur maigre", cela ne signifie malheureusement pas pour autant que vous évitiez d'office le risque de craquelures. Celles-ci peuvent tout simplement provenir d'une reprise prématurée sur une couche, même maigre, mais insuffisamment sèche, d'où l'apparition d'embus et, tôt ou tard, de craquelures. Le liant de la couche du dessus est pompé par la couche du dessous. La couche de surface se trouve appauvrie en liant, d'où sa baisse de valeur et son apparence mate. Devenue accidentellement plus maigre que la couche du dessous, elle perd sa souplesse et finit par craqueler.
Autre motif analogue : l'emploi d'une couleur séchant difficilement (un noir d'ivoire, une laque, un jaune ou un rouge organique...) sur laquelle vous avez repris trop tôt avec une couleur séchant vite (un blanc de plomb, un bleu de cobalt, une terre d'ombre...). Le résultat est le même.
L'utilisation d'un siccatif n'est pas négative en elle-même. Ce qu'il ne faut pas, c'est :
- en abuser, surtout s'il s'agit d'un composé à base de cobalt. La peinture va très rapidement sécher en surface, créant une pellicule imperméable à l'air qui entravera le séchage de la peinture en profondeur : phénomène de "chausson aux pommes" ;
- user de siccatif dans les dernières couches.
Par contre, siccativer très légèrement une ébauche n'est pas négatif en soi-même, au contraire. Là encore, le choix du siccatif a toute son importance. Il faut privilégier un siccatif de profondeur.
Pour résumer, et quelles qu'en soient les causes exactes, ce type de craquelures provient très généralement d'un problème de séchage entre deux couches de peinture de nature différente.
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